Pillion, le regard de Harry Lighton

Avec Pillion, le Britannique Harry Lighton présente au Certain Regard son premier long métrage : l’histoire d’un jeune homme sans histoire joué par Harry Melling (Colin) qui, par l’intermédiaire de Ray (Alexander Skarsgård), leader d’un club de motards, découvre la communauté queers.

Comment est né ce film ?

On m’a envoyé le roman sur lequel il est basé (BOX HILL d’Adam Mars Jones) au début de la pandémie. Je l’ai trouvé sexy, drôle, émouvant, propice à la réflexion. Et j’ai immédiatement ressenti une affinité avec la psychologie des deux personnages principaux. Je savais que mon adaptation impliquerait des changements importants, mais lorsque j’ai rencontré Adam, il m’a offert toute la liberté dont j’avais besoin pour aller dans la direction qui me plaisait.

Quelle était l’atmosphère lors du tournage ?

L’atmosphère sur le plateau était vivifiante. Après avoir attendu si longtemps pour réaliser mon premier long métrage, je pensais vraiment être stressé. Mais les acteurs et l’équipe étaient tellement drôles et talentueux que je me suis éclaté. Après une décennie consacrée à l’écriture, je me suis souvenu à quel point j’aimais la réalisation.

Quelle a été votre méthode de travail ?

À chaque étape du processus, j’essayais de suivre ma curiosité. Une version se déroulait sur un bateau de croisière, une autre dans la Rome antique. J’encourageais mes acteurs à proposer différentes versions d’une scène, à essayer, à créer des espaces de découverte. En même temps, j’ai beaucoup travaillé avec mon directeur de la photographie pour que cette découverte se fasse dans le cadre d’une esthétique clairement définie.

Quelques mots sur vos acteurs ?

Tous ceux qui ont travaillé avec Harry Melling (Colin) savent que c’est un acteur incroyablement chaleureux et généreux. Il s’est vraiment investi dans le rôle de Colin : il s’est entraîné au Barbershop, a appris des mouvements de lutte, s’est rasé le crâne… Il est doté d’un charisme très particulier, totalement magnétique, mais pas du tout alpha.

Alexander Skarsgård (Ray) est une combinaison tout aussi inhabituelle. Il a l’allure d’une star de cinéma, mais il a aussi une personnalité tranchante, très enjouée et un peu flippante. Et plus notre méthode est « guérilla » (par exemple, tourner des scènes en caméra cachée au milieu d’une rue commerçante bondée), plus il semble l’apprécier. Il est prêt à tout.

Ensemble, je pense qu’ils apportent une complexité à des personnages qui, dans d’autres mains, pourraient rapidement devenir des stéréotypes en 2D. La subtilité de leurs interprétations est la clé du pathos du film.

 Qu’aimeriez-vous que les gens retiennent de votre film ?

J’espère qu’il les touchera. Qu’il fasse rire ou pleurer, qu’il excite ou qu’il mette en colère, peu m’importe. J’espère simplement qu’ils ressentiront autre chose que de l’ennui. Si cela les amène à remettre en question certaines de leurs idées préconçues, c’est également une bonne chose.

Un film que vous aimeriez recommander ?

Toni Erdmann (2016) de Maren Ade. Qui aurait cru qu’une réunion de travail entre consultants en management donnerait lieu à la scène la plus drôle de l’histoire du cinéma ? Depuis Requiem (2006) je me suis mis à battre le tambour de Sandra Hüller. Sandra, si vous lisez ceci, parlons-en !

Un mot sur votre prochain projet ?

Il s’agira peut-être de greffes de cheveux ou de lutteurs sumo. Ou des deux.