Magalhães : Lav Diaz revisite l’ultime épopée coloniale de Magellan aux Philippines

Dans Magalhães, présenté en Sélection Cannes Première, le cinéaste philippin Lav Diaz s’empare des derniers mois de la vie de l’explorateur portugais Fernand de Magellan, mort aux Philippines en 1521. Il en tire le portrait intime et hanté d’un homme confronté à ses propres ténèbres.

Vingt-sept ans après ses débuts, Lav Diaz s’impose comme un conteur majeur du cinéma mondial. Ses films, à la croisée de l’histoire et de la mémoire collective, explorent avec une intensité rare les cicatrices du passé colonial et les injustices sociales qui traversent les Philippines. À travers un style radical – longs plans fixes, noir et blanc, silences habités –, il poursuit une œuvre aussi politique que sensorielle.

Fruit de sept années de recherches, Magalhães s’inscrit dans cette veine : une fresque de trois heures où l’épure formelle sert une méditation sur le pouvoir, la conquête et les illusions du mythe civilisateur. Le film retrace les derniers mois de Magellan, engagé dans une confrontation fatale avec les peuples autochtones, jusqu’à sa mort sur l’île de Mactan en avril 1521.

Dans le rôle-titre, Gael García Bernal incarne un homme habité par ses visions, poursuivi par les voix de ceux qu’il prétendait découvrir. « C’est un film sur le vertige du pouvoir et le mythe de la découverte », explique Lav Diaz. « Magellan n’est pas un héros ici, mais un homme face à son propre néant. »

Tourné entre les Philippines, le Portugal et l’Espagne – notamment à Cadix, à bord d’une réplique du Victoria, le trois-mâts de l’expédition – Magalhães poursuit sa revisite des récits officiels entamé dès ses débuts. Fidèle à son engagement, Lav Diaz redonne voix aux oubliés de l’Histoire, et confirme son statut d’auteur intransigeant.